Les enfants de Diane sont un collectif à géométrie variable. Dans nos rituels nous réalisons numéros de lip collectifs et individuels, ainsi qu'effeuillage, stand up, claquement de doigts, et performances en tout genre. L'énergie qui nous traverse est chargée des voix que nous nous choisissons, nos corps sont augmentés et transformés. L'ambiance, toujours, est électrique. L'amour, lui, n'est jamais loin. En mai 2019, La Cata (Grenoble) nous invitait à présenter notre première exposition.
Un sabbat pour les Enfants du sabbat
« Les paillettes qui se dispersent sous les pas des visiteurs du Creux de l’enfer, formaient, le soir du vernissage, un cercle tracé au sol, comme ceux qui, dans la
magie blanche ou noire, délimitait un espace sacré à l’intérieur d’un espace profane. Ainsi donnait-il lieu à un monde temporaire au coeur du monde ordinaire, où, par exemple, des performances sont jouées les soirs de vernissage dans les expositions d’art contemporain. Il ne faut donc pas confondre les numéros de lip sync qui se sont produits ici avec autre chose, comme la mise en scène d’une image de night club gay ayant une visée métaphorique quelconque : il s’agissait réellement de numéros de
play back préparés avec ferveur par les membres du groupe Les enfants de Diane, formé à l’appel de Valentin Godard et Hélène Hulak dans l’idée d’organiser « un
sabbat pour les enfants du sabbat ». Il ne faudrait pas non plus prendre à la légère cette décision de substituer à une occasion de faire figure d’artiste celle d’organiser une fête en l’honneur de l’altérité. En sortant de l’école des Beaux-Arts, il déclarait vouloir « devenir une drag queen » (par définition, une identité temporaire) et dépassait le stade allégorique par un entraînement réel à simuler le port de talons (pour un corps augmenté), ou réussir le death drop (chute mortelle), un mouvement de danse caractéristique du voguing. Le jeu est plus sérieux qu’il en a l’air. Il s’agit d’éprouver ce qu’engage l’action de faire semblant : c’est un acte de transcendance multiple (des réalités, des genres, des codes) qui requiert un investissement physique, moral, voire politique et spirituel. C’est ainsi que résonnent les conseils donnés par la drag queen Misty postés sur le site des enfants de Diane, où il semble être question de se préparer à un combat en armure de strass, qui ne sera victorieux qu’à condition de vivre réellement et exagérément la chanson mimée sur scène. C’est cette exaltation à laquelle se sont convertis les enfants de Diane en se donnant entièrement au show dans une sorte de messe incantatoire, un rituel de transmigration, sans grande distance parodique : « Laissez vous habiter par les voix du passé. Synchronisez vous à la lumière de l’espace ». Par-delà la récupération des codes identitaires et la dilution de la culture militante qu’a accompli le divertissement mainstream, alors que les concours de lip sync font l’objet de télé-crochets en prime time vidés de toute substance homo-érotique, il pourrait s’exprimer ici ce qui est encore vif pour résister aux pouvoirs de domination.»
Catalogue d'exposition Les enfants du sabbat 19, 2018
lesenfantsdediane@gmail.com